
Sur son lac ne vogue qu'une embarcation à la bannière des Quintila, les souverains savoyards du crime. Un empire de jetons et de poudre, bâti dans la sueur et le sang, ainsi que le dernier d'Europe – purges et guerres ont fissuré les plus splendides palais, calciné trônes et loyautés. Les Alpes en tremblent : une avalanche slave s'annonce, celle qui ensevelira le milieu français. Les Quintila ne disposent plus que d'une seule carte : le secret des Elfes, vivant encore, vivant vraiment.
Sur le bateau, cinq âmes – parents et proches, confidents et compromis, chargés de soulager le clan de la marchandise. Une quasi-routine... si les Elfes eux-mêmes n'y pariaient pas leur survie.

Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas tout compris dans cette fiction donc il m'est assez difficile de vous présenter l'intrigue et les personnages comme je le fais d'habitude, parce que j'ai peur de dire des bêtises. Cependant, je vais faire de mon mieux pour rassembler les quelques petites choses que j'ai pigé pour vous présenter au mieux cette histoire, en commençant par le contexte.
Les Gisants, comme dit dans le résumé, ça se déroule dans les Alpes, à Aix, ouais ! dans notre petite France à nous et pas dans un monde inconnu, complètement inventé et onirique. Ici, c'est le monde réel, celui dans lequel nous vivons tous sans s'imaginer un seul instant que les Elfes existent vraiment et qu'ils vivent quelque part dans les Alpes, cachés du reste du monde et dans le plus grand secret. Or, une menace plane sur nous et le seul moyen d'y faire face, visiblement, c'est de faire appel aux Elfes et à leurs secrets, c'est pourquoi un petit groupe d'humain décident de partir à leur rencontre. Ces humains ne sont pas n'importe qui non plus, ils appartiennent à une sorte d'organisation criminelle savoyarde qui commercent avec les Elfes depuis un moment. Bon, j'avoue, la mafia savoyarde, ça m'a fait sourire ! On est tellement loin du milieu criminel souterrain hyper classe qu'on peut trouver habituellement, comme la mafia italienne ou chinoise. L'auteur classe sa fiction dans le fantastique rural et a tout à fait conscience que ça « ne vend pas du rêve » et c'est totalement ça ! Mais c'est ce contexte tellement atypique et campagnard qui fait de cette fiction un extraterrestre de la toile et un projet original qui vaut le coup de s'y attarder. C'est ce qui m'a, en partie, décidée de poursuivre ma lecture et de découvrir ce que cette histoire avait à me réserver.
Découpée en cinq actes, nous découvrons le premier (et le seul en ligne pour l'instant) au travers l'un des personnages du groupe des Quintila, la mafia savoyarde. Il s'agit de Lilian, le petit nouveau de la bande, celui qui a été recruté un peu au dernier moment par l'intermédiaire de son travail dans un bar où chante Edmée, l'un des membre du groupe. Si on sent que l'expédition excite sa curiosité et son désir d'aventure, à mesure qu'ils approchent de leur but, on sent que Lilian se demande ce qu'il fout là. Du genre maladroit, il n'a pas la carrure d'un mafieux et de loin ! C'est vraiment la pièce rapportée, le point de vue jeune et « innocent » du groupe. Cependant, même s'il est du genre rêveur, il reste observateur, méfiant, et prêt à prendre des initiatives, donc ça compense.
Il y a sûrement plus à dire sur ce personnage mais je vous laisse découvrir ce qui le compose par vous-même.
Mais que dire des autres personnages ? Car ils sont tout un groupe, donc qu'en est-il des compagnons de Lilian ? Comme dirait Perceval : c'est pas faux, comprendre ici « c'est vrai mais j'ai pas tout pigé ». Non, vraiment ! Ils sont quatre autres larron, deux femmes et deux hommes, nommés Alia, Edmée, Blaise et Saignard. Alia est le genre de femme qui sait ce qu'elle veut et qui sait comment l'obtenir avec classe et distinction. Edmée est plus posée et plus douce et aime chanter pour détendre l'atmosphère. Blaise préfère le sarcasme et les plaisanteries tandis que Saignard, comme son nom l'indique, est le râleur de service et le gars à ne pas embêter. C'est bien tout ce que j'ai compris à leur sujet car celui qui est véritablement mis en avant dans cette partie, c'est Lilian, et si on apprends beaucoup sur lui, son passé, sa famille, les autres passent pas mal à la trappe. Sans doute l'auteur leur réserve-t-elle une introduction plus complète lorsque leur tout viendra à chacun de devenir le narrateur. Mais du coup, je trouve que ça manque beaucoup de ne pas obtenir plus d'informations à leur sujet. Déjà qu'on est jeté in media res dans l'histoire, sans savoir, autrement que par le résumé, ce qu'il se passe et pourquoi ils ont entrepris ce voyage en bateau, alors j'aurais aimé mieux connaître les personnages composant cette équipe de rêve !
Bref, vous l'aurez compris, ce premier acte pose les bases, certes, mais cela ne vous empêchera pas de vous sentir pas mal largués quant à l'intrigue générale et les personnages qui vous accompagnent tout au long du texte. Certes, Lilian est plutôt bien croqué, il me paraît bien construit et réaliste, mais les autres demeurent flous et incertains. Toutefois, il ne s'agit que du début et l'idée de base et le contexte sortent réellement de l'ordinaire et apportent ce petit quelque chose qui donne envie de se plonger dans la lecture.

Vous vous demandez sûrement pourquoi la partie « intrigue et personnages » semble à ce point remplie d'incertitudes de ma part ? La catégorie « style » devrait vous apporter la réponse.
Le style des Gisants est difficile ? Compliqué ? Pas de tout repos, en tout cas. Et si cette complexité peut en effrayer plus d'un à la première lecture, tant elle brouille vos repères et vous égare dans ses méandres, c'est aussi elle qui m'a poussée à poursuivre ma lecture. Parce que ça m'a intriguée et que j'ai voulu voir ce que ça aller donner jusqu'à la fin. Je n'ai pas été déçue, certes. Par contre, je me suis sentie plusieurs fois complètement perdue, j'en ai peur.
Entre les phrases parfois très longues que nous offre l'auteur, des phrases sans aucun verbe auquel se raccrocher, juste composée d'une succession d'impressions, de sensations, de remarques jetées par le personnages sans ordre précis apparent et la construction des chapitres assez aléatoire, celui qui comprend tout du premier coup mérite mon admiration la plus totale. Vraiment.
L'auteur aime les associations de mots et je ne déteste pas cela non plus. Mais quand le style est quasiment composé que de cela, tout le temps, quel que soit le sujet abordé, ça devient vite lourd et fatiguant à lire. Les phrases sont souvent très longues, bourrées d'adjectifs, entrecoupées de virgules tous les trois ou quatre mots ; on se sent vite perdue dans cet océan de mots et on ne comprend plus ce qu'il se passe exactement. Je me suis souvent arrêtée en plein milieu d'une phrase en me demandant pourquoi le personnage passait d'un sujet à un autre entre deux virgules, pourquoi il n'y avait pas de suite à une réflexion précise, comme si le personnage c'était subitement arrêté en plein milieu de sa réflexion pour passer à autre chose, ou pourquoi la première partie de la phrase ne correspondait pas forcément à la dernière partie. Cela dit, cet effet n'est pas dû à une overdose d'herbe fumée, ou à l'incompétence de l'auteur. Non. Parce qu'en fait, on sent que le style est travaillé. Très travaillé. Et qu'il y a un sens derrière chaque association, derrière chaque point d'exclamation, derrière chaque onomatopée glissée brusquement dans le texte. C'est juste que c'est tellement nébuleux qu'on finit par ne plus rien comprendre.
D'un autre côté, cette façon d'écrire retranscrit très bien la façon de pensée de quelqu'un. Parfois, quand on pense à quelque chose, on part sur un sujet, puis on s'arrête, on part sur autre chose, on entrecoupe ça de sensations, de réactions, le tout est peu brouillon mais nous, on se comprend, hein ? Bah, là, c'est la même chose (en mieux, quand même, ah ah). Seulement, à la longue, ça devient difficile de suivre ou même de garder intérêt.
Le problème, je pense (et là ça ne tient que de mon propre point de vue) c'est que ce style ne sert pas que les pensées du personnages, mais même les actions. Quand il se passe quelque chose dans l'histoire, par exemple : l'arrivée des personnages au village des Elfes, le style reste nébuleux. Or, on a quitté l'introspection du personnage, on est plus dans le passif mais dans l'actif, et ici, on ne sent pas de changement, si bien qu'on ne comprend pas forcément les actions. Plusieurs fois, on passe de l'action à l'introspection, des événements présents à des événements passés, sans jamais vraiment s'en rendre compte, si bien que je ne comprenais le déroulement des événements qu'à la fin du chapitre. Alors, ça peut être un plus, si l'auteur veut donner cet effet-là à son texte. Cependant, je doute que ce soit vraiment voulu ici.
Néanmoins, est-ce que ce style nous accompagnera tout au long de l'histoire ou est-il propre à l'acte I et au personnage de Lilian qui voit tout de façon fractionnée et qui aime s'exprimer par allusions et à demi-mot ? Je ne saurais le dire, vu que l'acte II n'est pas encore commencé. J'espère simplement qu'il s'agit vraiment de l'effet Lilian, car je ne sais pas si une fiction entièrement rédigée de cette façon serait digeste. Et surtout, si à chaque personnage, le style diffère pour coller à sa personnalité, le rendu serait d'autant plus intéressant à découvrir.
Voilà pour ce qui est de la construction du récit et du style en lui même. Et du coup, ça donne quoi niveau description et scène d'action ? Ça donne quelque chose d'assez spécial, c'est certain. Les descriptions physique des personnages et des lieux sont bonnes, bien que sortant de l'ordinaire. Comme je l'ai dit plus haut, Lilian est du genre à aimer les allusions, les associations de mots et de pensées, alors le rendu final est particulier. C'est comme assister à des flash concernant des aspects bien ciblé d'une personne ou d'un lieu. En quelques secondes, votre tête est inondée d'images que nous n'entrapercevez clairement qu'une petite seconde et à partir de cela, vous devez vous construire votre propre rendu final. C'est assez étrange mais aussi assez amusant et perturbant. À essayer !
Par contre, les scènes d'actions, forcément, représentent le plus gros point faible de cette fiction. Étant donné que vous avez du mal à dissocier pensées personnelles du personnages et action pure et dure, ces scènes restent difficiles à imaginer et à comprendre. Je crois que je n'ai jamais réussi à me représenter dans le détail et avec fluidité les actions des personnages. J'avais toujours un temps de décalage avec la narration, si bien que je me disais souvent « ah mais en fait, oui, il a fait ça ! » ou « ah, en fait, il s'est passé ça ! ». Avouez que ce n'est pas le top.
En gros, que dire du style ?
Le style des Gisants est très, très complexe, très travaillé, très fouillé, mais il demeure mal exploité au niveau des scènes d'action, ce qui perd le lecteur et dessert l'histoire. Les nombreuses virgules, les trop nombreuses associations, le manque de verbe, sur des phrases très longues essoufflent le lecteur et nuisent à la fluidité du texte. Cependant, pour son originalité, son petit quelque chose de très personnel et de surprenant, il mérite d'être lue. Très franchement, faites comme moi. Essayez de lire la première partie du premier acte et voyez si le style réussit à vous parler ou non. Vous pourriez avoir une très bonne surprise comme ne pas aimer du tout.
Le style des Gisants n'est pas fait pour tout le monde, c'est certain. Mais c'est aussi ce qui contribue à sa beauté, Il ne ressemble à aucun autre !

En bref, Les Gisants vous présente une histoire d'Elfes comme aucune autre, une histoire qui se déroule en France, en Savoie, là où l'on s'attend le moins à découvrir une mafia et encore moins une mafia composé de campagnards classes et étranges tout à la fois dont la mission est d'obtenir l'aide d'un peuple de légende bien peu amical. Stylistiquement, Les Gisants est un puzzle littéraire que le lecteur se doit de résoudre au fur et à mesure de sa lecture afin de comprendre le sens d'un passage ou même de tout un chapitre. Par son originalité, il mérite que vous preniez le risque de vous perdre dans les pensées de Lilian, le personnage de ce premier acte. Pour le petit quelque chose qui ne manquera pas de vous intriguer dans cette fiction : lancez-vous !

shahanshah, Posté le samedi 14 janvier 2017 16:14
Alright, alright ! Merci~